lundi 11 janvier 2016

Une de faite, plus que 51 semaines et on est en 2017 par Thomas Veillet

Il y a une chose qui est assez paradoxale, ou assez drôle, c’est selon : en général, en fin d’année on s’excite sur un probable « Christmas Rally », puis Noël arrive, on mange, Nouvel An arrive, on mange encore et puis on oublie le thème du « Christmas Rally », surtout quand il ne fonctionne pas, comme en 2015.
Alors on se détend. On se dit que c’est les vacances, le soi-disant « esprit de Noël » (et des fêtes de fin d’année) et puis que de toutes façons, on verra bien l’année prochaine, vu que l’on aura tout de même 12 mois ou 52 semaines, ou 365 jours ou 8760 heures pour faire de la performance pour les clients. Ce qui devrait être amplement suffisant.
Enfin, normalement.
Sauf qu’il y a des années, comme 2016, au hasard, qui sont des années qui commencent mal. Comme ces matins où on l’on renverse le café, que l’on se pète la figure dans les escaliers, que l’on tache sa cravate et que le chien fait ses besoin dans le salon. Ces matins où on l’on se dit que l’on s’est levé du pied gauche.
En 2016, on a carrément COMMENCÉ l’année du pied gauche.
Pas besoin d’être un historien des marchés boursiers ni d’avoir vu 64 fois Wall Street, 64 fois Wall Street 2 « Money never sleeps » et de connaître par cœur les dialogues du Loup de Wall Street pour se rendre compte que l’on s’est fait le pire début d’année depuis des siècles et des siècles, amen.
Si l’on regroupe l’ensemble des marchés du monde, les 4 premiers jours de trading auront coûté 2.3 trillions de capitalisation boursière, autrement dit, l’équivalent de 13 millions de Porsche’s 911 Targa 4 GTS modèle 2015. À peu près. C’est pour donner une image.
13 millions de Porsche’s ont donc été vaporisées, rayées des cadres, disparues des livres de compte et autre comptes en banque. Tout ça en 4 jours.
Et tout ça parce que la Chine a :
1) publié des chiffres économiques pourris
2) mis en place le concept des « circuit breakers »
3) ramené sa monnaie au plus bas depuis 5 ans
Si l’on revient rapidement sur le sujet de la Chine, si vous êtes surpris et déçus des chiffres économiques chinois – et je dis ça sincèrement – c’est que vous êtes un peu naïfs ou que vous refusez de voir la vérité en face.
Car cela fait tout de même des mois que l’on nous prédit un ralentissement, que l’économie chinoise c’est plus ce que c’était et que c’était mieux avant. Des mois que le Gouvernement pagaye à contre-courant dans les eaux boueuses du Yang-Tsé-Kiang pour essayer de mettre en place à peu près toutes les stratégies économiques développées dans les plus grandes Universités de la planète et des environs, avec l’efficacité du service de la mobilité en ville de Genève – en résumé, c’est nul.
china cartoonsEn gros, la Chine a été le moteur de croissance de ces dernières années. D’ailleurs, pendant un moment on a même commencé à penser que jamais rien ne freinerait l’économie chinoise et qu’elle ne ferait que de croître. Pour toujours. Un peu comme la bulle internet de l’an 2000.
Et puis là, tout d’un coup, on se dit que la Chine est devenue mature et que son taux de croissance ne peut pas être de 15% annualisé pour toujours et tout le monde se demande où jusqu’où la croissance locale va baisser. Et quand ça baisse, c’est toujours la même histoire, l’histoire du type qui saute du 50ème étage et à chaque étage devant lequel il passe, il hurle : « JUSQU’ICI TOUT VA BIEN ».
Sauf que, logiquement, plus longue sera la chute, plus dur sera l’atterrissage. Bien qu’en tenant compte de l’accélération maximale que tout corps peut atteindre en chute libre, il y a un moment, ça n’a plus vraiment d’importance.
Bref, on a la trouille pour la croissance et l’angoisse nous étreint, mais ce n’est pas nouveau. Le fait que le Yuan se fasse démonter n’est pas non plus une surprise, puisque tout pays en difficulté de croissance à tendance à dévaluer sa monnaie pour faciliter les exportations. Demandez à Draghi.
Et pour terminer, on peut aborder le concept des « circuit-breakers ». C’est une bonne solution pour empêcher les marchés d’aller trop bas en cas de panique. Cela pose en revanche un problème parce qu’une fois que le marché est fermé pour la journée, il ne peut pas non plus rebondir. C’est donc à double-tranchant. De plus, cela fonctionne toujours mieux dans un marché mature, un marché qui a de la bouteille et qui n’est pas (moins) manipulé que la Chine. Preuve a été faite la semaine passée ; quand on vous « stoppe » le marché pour 15 minutes après 5% de baisse et qu’il ne reste « plus que 2% » de baisse avant de fermer pour la journée, c’est trop tentant de ne pas tenter le coup pour grapiller une journée de congé. La preuve, jeudi passé la Chine aura été ouverte en tout et pour tout pendant 29 minutes.
À partir de là, à partir de la Chine qui se faisait défoncer, nous avons appliqué la bonne vieille théorie de la CONTAGION. Ou de l’effet papillon, c’est selon.
On s’est dit que si ça allait mal en Chine, ça ne pouvait pas aller bien au Japon, en Inde, eu Europe et bien sûr, aux USA. Que ça allait peser sur le pétrole, puisque plus personne n’allait ni consommer, ni produire, donc les matières premières allaient se faire défoncer et que finalement, le seul truc qui devrait bien fonctionner cette année, c’est l’or qui refaisait parler de lui en tant que valeur refuge. FINALEMENT.
Bref, nous avons vécu notre pire début d’année depuis… Depuis très très longtemps.
La grande question que tout le monde va se poser cette semaine. Surtout pour ceux qui étaient encore en vacances la semaine passée, dont je fais partie, est la suivante :
« EST-CE QUE C’EST UNE OPPORTUNITÉ INOUÏE DE COMMENCER L’ANNÉE EN FAISANT LES SOLDES ? »
Ou pas.
Ce que je trouve fascinant – bien que cela n’engage que moi – c’est que si l’on revient en arrière sur l’année 2015, nous l’avions commencée en disant que c’était un « coup sûr » de voir l’Europe monter because of QE et Draghi. Après les turbulences que l’on a connue en Grèce et ailleurs, à -10% sur l’Europe on était tous en train de se tirer en courant pour trouver des canots de sauvetage et à la fin de l’année à +10% sur l’Europe et +20% en relatif, on se disait que « si on avait su, on aurait racheté ».worst start
Bonne nouvelle, on est déjà presque à moins 10% sur l’Europe après une semaine. Et pour ceux qui n’auraient pas suivit le feuilleton, le QE est toujours là, Draghi veut toujours faire Whatever it takes pour sauver l’économie du continent et si ça se trouve, il va rajouter une couche de QE dans les mois qui viennent.
Logiquement, on devrait plutôt faire une liste pour faire les courses plutôt que de se demander si la Chine va contaminer le reste du monde et si le fait que la croissance soit de 6% ou de 7% va changer quelque chose au taux de chômage en Europe et forcer François Hollande a vraiment devenir un Président et pas un clown…
Mais comme d’habitude, il est toujours plus simple de céder à la panique et à l’effet de groupe, plutôt que de tenter de ramer à contre-courant.
L’année a donc mal commencé. Le pétrole ne vaut plus rien. L’or est à nouveau une valeur refuge et les statisticiens sont de retour et nous disent que les 5 premiers jours de trading de chaque année prédisent la direction « annuelle » du marché 68% du temps. Et puis dans deux semaines, on va nous dire que « si janvier est négatif, l’année le sera aussi », c’est statistiquement pourri et prouvé. Enfin, sauf les années où cela ne fonctionne pas.
Pour faire simple, nous sommes à l’aube d’une nouvelle année. Si l’on se met à l’échelle d’une journée, le soleil n’est pas encore levé et il y a une chance sur deux que le marché termine plus haut que là où il a fermé vendredi passé et une chance sur deux qu’il termine plus bas. ÇA, c’est une certitude.
Alors moi je dis, quand on voit le niveau et la tronche des marchés obligataires, que l’on voit le comportement psychotique des matières premières, il me semble que d’acheter des actions de qualité qui paient de dividendes, me paraît peut-être la meilleure des stratégies pour 2016. Générer des revenus par les dividendes, choisir les bonnes thématiques et se discipliner dans son investissement avec une vision un peu plus longue que la fin de la semaine, me paraît la meilleure solution et surtout, surtout, il faut arrêter de regarder le marché avec l’approche hyper-court-terme qui est la notre ces dernières années et ça, ça sera ma résolution 2016.
chevrePour le reste, la Chine a déjà supprimé ses « circuit-breakers », le Gouvernement va bien finir par trouver une solution pour soutenir un minimum son économie et les turbulences vont se calmer. Le vent de panique qui a saisit les marché à froid en ce début 2016 devrait tomber et l’on va se rendre compte qu’il y a encore des choses à faire, des opportunités à saisir, des actions à acquérir et de la spéculation à spéculer. Comme d’habitude. D’ailleurs, vendredi on a eu les chiffres de l’emploi US et même s’ils étaient bons et corroboraient la décision de la FED, tout le monde s’en fout, tout le monde est Chinois cette semaine.
Encore une fois, je refuse de croire à un krach boursier que tout le monde nous annonce. Ce n’est pas comme ça que ça se produit et ce n’est PAS COMME CELA que ça va se passer.
Dans les nouvelles du jour qu’il faut retenir en dehors de la Chine qui a perdu 10% et du reste du monde qui s’est fait allumer en harmonie, on retiendra que le service d’Apple « Apple Music » a passé la barre des 10 millions d’abonnés. Il leur aura suffit de 6 mois pour avoir 10 millions d’inscrits alors que Spotify aura mis 6 ans.
Merkel n’ira pas à Davos, la pression due aux agressions sexuelles commises par des migrants devient trop forte. Si vous aviez acheté des actions Time Warner le premier jour de l’année, vous avez tout de même gagné 10% alors que le reste du monde se faisait casser les genoux.
Gros titre du FT : «les investisseurs prévoient de réduire leur exposition aux Hedge Funds suite aux mauvaises performances de 2015 » – encore une fois, il y a une chose que l’on a de la peine à comprendre dans la finance, c’est qu’il ne suffit pas d’acheter un panier de 250 Hedge Funds pour se déclarer « investi dans les Hedge Funds ». Appliquer cette stratégie n’a pour but que de baisser la volatilité de votre portefeuille et cela n’a aucun sens, à moins que le but avoué dès le début soit de baisser la volatilité de votre portefeuille en étant pleinement conscient qu’en achetant 250 fonds différents, vous n’arriverez qu’à les neutraliser les uns les autres, pour ne faire rien ou pas grand-chose à la fin. En gros, plus on surdiversifie plus on augmente le Beta du portefeuille et moins on avance plus vite…
En revanche, il serait peut-être bon de commencer à chercher la prochaine pépite des années à venir en se mettant RÉELLEMENT à sélectionner des Hedge Funds et pas des baskets structurés par des banques qui n’ont aucune idée sincère de ce qu’il y a dedans… C’est deux métiers différents. Brasser de l’air et frimer ou faire de la vraie sélection. Et cela vaut peut-être la peine d’y penser en 2016.
Le Jackpot de la version US de l’Euromillions a atteint 1.3 milliards. Le Powerball n’a jamais été aussi élevé et si vous gagnez vous n’aurez plus besoin de me lire le matin, il y aura nettement mieux à faire.
Dans le Barron’s de ce week-end, on revient sur la claque de la semaine passée, sur la résurgence des Bears et sur le fait que la seconde semaine de l’année pourrait être moins pire que la première. Ce qui n’est pas non plus super risqué comme déclaration, tant il paraît improbable que l’on se reprenne un nouvel uppercut de 6% aux USA, surtout que la Chine déploie des trésors de diplomatie auprès des médias internationaux pour dire que « promis-juré-craché ça ne se reproduira plus »…fifth
Le Barron’s pense également que le titre Hanesbrands a 30% de potentiel de hausse. Ils sont également relativement inquiets sur les perspectives de l’Asie en ce moment et ils pensent que le Yuan est le réel point faible de la Chine.
Goldman pense que les 8 titres les plus chers du marché US sont : Tripadvisor, Coach, Boeing, Fossil, Intel, Illumina, Nvidia et Transocean. Le potentiel de baisse pour arriver à une évaluation correcte est de 20% sur Tripadvisor et de 63% pour Transocean. Moralité : si vous cherchez des idées pour être « short » ET que vous avez confiance en Goldman Sachs ET que vous êtes sûr que lorsque vous vendrez, ce n’est pas eux qui rachèteront, c’est dans cette liste que vous devez fouiller.
Et puis, la nouvelle la plus déprimante de ce début d’année ; les 400 plus riches du monde ont perdu 194 milliards durant la première semaine de l’année. C’est promis, demain je fais ouvrir un CCP à la chaîne du bonheur pour leur donner un peu de joie.
En ce lundi matin, tout le monde aura les yeux fixés sur la Chine. Ça commence mal, puisque Shanghai est déjà en baisse de 2.40% à 5h30 du matin, entraînant avec lui le reste de l’Asie. Tokyo est fermé, mais Hong Kong suit le grand-frère et recule de 2.45%. Visiblement, le rebond de vendredi passé n’était qu’un feu de paille et pour l’instant, le doute plane toujours sur l’Empire du milieu.
Comme tous les matins, on termine avec le calendrier économique de la journée ; nous aurons la production industrielle espagnole, les Retail Sales en Suisse, le Sentix Investor Confidence en Europe – pour autant que l’on ait pu trouver un investisseur qui a confiance en quelque chose ou en quelqu’un. Et aux USA, il y aura aussi le Fed Labor Market Conditions.
terrorEt puis, n’oublions pas que la fin de l’année correspond également à la fin d’un trimestre et que ce lundi 11 janvier, Alcoa va publier les chiffres de son trimestre et ceci, comme il est de tradition, lancera officiellement la saison des résultats du quatrième trimestre 2015.
Pour le moment, en Occident, les futures sont en hausse de 0.08%. On ne peut pas qualifier cela de rebond stratosphérique pour le moment. L’Euro/$ est à 1.0913, le Yen vaut 117.44, le Bitcoin s’échange à 446$ et le rendement du 10 ans américain est de 2.11%.
Côté Suisse, l’Euro/Suisse, à quelques jours de l’anniversaire de l’explosion du taux plancher, est à 1.0855 et le $/CHF s’échange à 0.9948.
En conclusion de cette longue première chronique de l’année, je voudrais vous dire trois choses :
1) Je suis de retour
2) Tous mes vœux pour 2016
3) Ne vous inquiétez pas, après la panique, le beau temps
Nous on se retrouve demain en pleine forme pour la suite des aventures de Tintin et le Lotus bleu en live et en couleur.
À demain.
Thomas Veillet
Investir.ch
Serge Poznanski

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