Il y a moins de trois semaines de cela, alors que l’on bouclait la fin de l’année, on ne dira pas que le niveau de confiance était à son maximum, mais nous étions revenus à la raison. Nous nous disions que si Yellen montait les taux, c’est qu’elle savait ce qu’elle faisait, que Draghi avait manifesté son intention de soutenir le marché et de réitérer son QE pour les mois à venir et que, finalement cette économie n’allait pas trop mal.
On se disait que le scénario de fin 2014 qui disait que l’Europe ne pouvait que monter en 2015 avait bien fonctionné (même si cela ne s’est pas fait dans la douceur et la tendresse) et que, vu que la situation restait la même ET qu’en plus l’Europe donnait même (parfois) des signes de croissance, 2016 devrait être une bonne année.
Nous n’étions pas « sereins », mais on avait l’impression que l’on avait appris des errances de 2015 et que l’on ne se laisserait plus avoir par des ventes de paniques ou des marchés qui vont dans tous les sens sans trop savoir pourquoi.
LE PROBLÈME, c’est que ces belles résolutions de fin d’années n’auront eu le mérite de tenir uniquement parce que les marchés étaient fermés.
Dès les premières heures de 2016, la Chine nous a tous remis d’accord et l’on est repassé en mode « au secours, on va tous y passer ».
Pour ceux qui l’avaient déjà oublié, la Chine va mal. La Chine va moins bien que ce que l’on avait été habitués. La transition d’une économie émergente avec une croissance monstrueuse à une économie « normale » se fait avec de grandes difficultés alors que ce « retour à normale » a des conséquences terribles sur des théories qui étaient censées durer des années et des années – sur les commodities entre autres – alors que l’on se demandait si l’on aurait assez de matières premières sur la planète pour nourrir l’appétit gargantuesque de la Chine il n’y pas si longtemps, voici que l’on se demande qui pourrait vouloir acheter tout ce surplus dont personne ne veut.
La Chine, qui était censée nous offrir la croissance éternelle, à défaut de la jeunesse éternelle, est en train de nous péter entre les mains et tous ces espoirs fondés sur elle sont difficiles à passer par « pertes et profits ». Cela aura été le déclencheur du « sell off » de ce début d’année.
Hier, alors que la Chine faisait mine de se stabiliser, les intervenants se sont concentrés soudainement sur le pétrole. Et c’est lui qui aurait déclenché le sell-off sur les marchés US qui se prenaient à nouveau une volée de bois vert et terminaient au plus bas depuis 3 mois. Les 1900 ont littéralement sauté à la première tentative et l’on se retrouve dans une position que l’on qualifiera de « plus que délicate ».
On peut se poser des questions sur la raison de la baisse d’hier aux USA. En effet, ce n’est sûrement pas à cause du discours de l’état de l’Union, mais on peut se demander si le mélange de la baisse du baril – qui a tout de même daigné s’arrêter sur la zone « psychologique » des 30$ – et d’un soudain consensus global qui pense que l’économie US et le consommateur sont au plus mal, n’y sont pas pour quelque chose.
En effet, d’un côté vous avez le baril qui baisse, en théorie c’est plutôt positif pour le consommateur qui va forcément payer moins cher son plein d’essence et qui pourra allouer cette économie à l’achat d’un objet parfaitement inutile et indispensable et relancer le secteur de la consommation…
Auquel cas, on peut raisonnablement se demander, et c’est ce que l’on fait en ce moment, si la baisse du pétrole n’est pas plutôt un indicateur négatif de la tendance économique.
Je rappelle, pour mémoire, que l’on disait qu’à 100$, le baril était un facteur déclencheur de récession. Si l’on est logique, on devrait se taper sur le ventre et se saouler au Spritz si le pétrole baisse, puisque la logique voudrait que plus le pétrole est bas plus ça rigole. Sauf qu’en fait NON…
Le pétrole moins cher c’est bien, le pétrole trop bon marché, c’est pas bien. On aime quand c’est dans la moyenne. Donc sous les 30$, ça nous stresse.
Hier nous avons donc oublié momentanément la Chine, puisqu’elle faisait mine de se stabiliser et les traders américains se sont concentrés sur le fait que le consommateur était en train de nous lâcher et que le pétrole était le parfait exemple imagé de la chose.
On a donc tiré sur tout ce qui bouge mais surtout sur le secteur de la consommation et des pétrolières. Au passage on en a également profité pour tirer sur les titres qui ont cartonné récemment, NetFlix et Amazon par exemple. Pendant que des Williams ou des Tesoro se prenaient entre 17 et 12% de baisse respectivement.
Bref, sale journée aux USA et dire que tout avait bien commencé avec un rebond qui avait l’air d’être un « coup sûr », un peu comme le baril qui va à 20 est un « coup sûr ».
Et puis, comme d’habitude, quand tout va mal, on nous sort les ours. Hier, il y a eu Edwards de chez SocGen qui est pratiquement l’inventeur du Bear Market et qui n’a le droit de parler seulement quand le marché a déjà perdu 10% en relatif, qui est venu nous dire que, selon lui et SI IL A RAISON, le marché devrait perdre 75% et retourner en-dessous des plus bas de 2009, on parle même de 666 sur le S&P500 – à ce rythme-là, Roubini devrait bientôt redevenir populaire.
Finalement, quand on regarde les indices hier, on se dit que l’Europe a bien tenu le choc, mais c’est surtout parce que l’Europe ferme à 17h30 heure de Boncourt, et que les USA traitent encore 4 et 30 minutes ensuite et c’est LÀ que le sell-off a vraiment eu lieu. Ce matin en Europe, le réveil ressemblera fortement à une gueule de bois magistrale.
Actuellement, nous sommes en mode « brace, brace » avec la tête entre les genoux et les masques à oxygènes qui sont sortis et on espère juste que le pilote va réussir à nous poser l’avion en catastrophe plutôt que l’on rate la piste et que l’on finisse dans l’usine de raffinage de pétrole à côté de l’aéroport. Reste plus qu’à attendre.
Si l’on cherche des mots rassurant et des bonnes nouvelles ce matin, ce n’est probablement pas du côté de la Chine que nous allons les trouver, puisque la fonte des neige continue dans la région, non seulement l’indice Chinois perd à nouveau 1%, mais en plus il se retrouve au plus bas des plus bas, à savoir les bas de l’an passé, du coup on peut dire que le rebond de la Chine, c’est du passé et qu’en plus on se rapproche dangereusement de la zone de « Bear Market » – À noter que ce matin la Chine est en baisse de 45% depuis les plus haut du mois de juin 2015.
Les chiffres économiques au Japon étaient… J’hésite entre immonde, dégueulasses ou tout pourri, le Nikkei a choisi, entre ça et les ricains qui se font déglinguer et la Chine qui est cliniquement morte, l’indice japonais se prend près de 4% dans le bento.
Du coup, cela ne surprendra personne si Hong Kong recule de 1.6%.
Côté pétrole, les inventaires n’étaient pas bons. What else ? Ce matin le baril est à 30.54$ et côté or qui, je vous le rappelle, même malgré son dynamisme d’escargot écrasé, reste une valeur refuge, il rebondit MASSIVEMENT avec la débandade d’hier et gagnait tout de même 7$ à 1093 ce matin…
On notera aussi que Twitter est au plus bas de tous les temps #aaaaaahhhhh #cestquoiletexte #onestfoutu et GoPro est au plus mal, puisqu’hier soir la société a fait un « warning » et prévenu que ses ventes pour le trimestre seraient un « DÉSASTRE » – ce n’est pas moi qui le dit, c’est eux. Le titre perdait 27% de plus hier soir et cette après-midi à l’ouverture, ça risque d’être pire.
À ce sujet, je vais soumettre ma propre analyse de terrain :
L’an passé, en vacances de ski à Tignes, à peu près deux skieurs sur trois avaient une GoPro vissée sur le casque. Même le type de 50 ans qui passait son premier flocon et qui venait de maîtriser (avec peine) le chasse-neige, se trimbalait avec une caméra sur la tête – ce qui laissait présager des soirées passionnantes au coin du feu à regarder tonton se casser la figure pour 214ème fois de la journée… ça c’était en février 2015.
La semaine passée, à Verbier, les seuls qui se trimbalaient avec une GoPro sur le crâne c’était les Freeriders Britanniques qui partaient sauter dans les rochers en haut du Mont-Fort, histoire que leur famille puisse voir leurs derniers instants en vidéo. Autrement, personne ou presque, n’utilisait la caméra en question… Inutile de vous dire que ça doit se ressentir dans les ventes. Reste plus qu’à espérer que les drones et la réalité virtuelle va sauver GoPro, sinon ils n’auront plus qu’à miniaturiser leur matos et se lancer dans la gastroscopie.
Dans la série « l’an passé ça a fait mal et cette année ça sera pire », Pershing Square – le fonds de Bill Ackman est déjà en baisse de 11.4% depuis le premier janvier. Pour ceux qui veulent faire encore un tour de manège, je crois que vous pouvez encore acheter des tickets.
En ce qui concerne les prédictions boursières.. Toute la planète des stratèges nous prédisaient une année ennuyante et sans grand mouvement avec une performance nulle ou presque en fin d’année. Depuis 48 heures, il ne se passe pas 1 heure sans qu’une banque ou un broker vienne nous annoncer la quasi-fin du monde des marchés boursiers avec des objectifs qui ne sont même pas dans le manuel. Encore une fois, c’est très tendance de la jouer moutonnier. Dans le doute, on aura tous tort ensemble et toujours mieux que d’avoir l’air idiot tout seul.
Alors en signe de solidarité, je vais vous fait part de mon objectif sur le S&P500 pour 2016. Je tiens d’abord à vous préciser que j’ai utilisé toutes les méthodes technologiques et mathématiques de pointe pour arriver à ce chiffre, que j’ai fait plusieurs fichiers excel, que j’ai sous-traité une partie des calculs dans une usine chinoise et que j’ai tout recalculer un seconde fois en faisant des offrandes vaudou et en jouant aux osselets.
J’arrive donc à la conclusion que le S&P500 devrait à 6.
Pas 666 comme le dit Edwards, moi je pense qu’il va à 6 tout court et que l’on va revenir en-dessous des plus bas du krach de 1929. Oui, je sais, c’est ridicule, mais au moins je serai le seul si jamais. Mais si vous voulez, vous pouvez aussi fabriquer votre propre objectif sur le S&P en le jouant au dés. Il semblerait qu’en ce moment ça soit très tendance d’avoir un objectif débile à proposer.
Dans les autres nouvelles importantes, le patron de Google, Schmidt, va rencontrer le pape et AB Inbev fait face à une demande record pour son emprunt obligataire de 30 milliards. Il est clair que vu l’ambiance, l’alcool semble être la dernière solution. Il viennent également d’annoncer qu’il y UNE personne qui vient de gagner le Powerball américain et qui va encaisser 1.5 milliards et des poussières et enrichir le fisc de plus de 700 millions.
Le gourou des bonds de chez Goldman pense que les Junk Bonds vont repartir en 2016 et il pense que la FED va monter les taux 4 fois cette année. La banque US est également bullish sur le Japon et sur l’Europe. Toujours à propos de Goldman, ils ont écrit une lettre aux autorités boursières pour prévenir que les marchés ne sont plus aussi efficients qu’avant et que le trading électronique et autres high frequency traders sont en train de pourrir le système et qu’un jour au l’autre on va se prendre la muraille de Chine sur la figure. Ça fait plaisir de voir que Goldman Sachs pense la même chose que moi… Bon, moi ça m’énerve mais Goldman, eux, ça les frustre surtout parce qu’avant c’est eux qui gagnaient à tous les coups et plus maintenant.
Côté chiffres économiques, nous aurons la production industrielle italienne, le GDP allemand, la Banque d’Angleterre qui va boire le thé et nous annoncer, ou pas, une hausse des taux. La BCE qui va publier un truc qui ressemble aux minutes du dernier meeting de la BCE. Les Jobless Claims aux USA, les prix à l’importation et à l’exportation et le Bloomberg Consumer Confidence qui ne sert strictement à rien et que personne ne regarde.
Pour ce qui est des publications trimestrielles, nous aurons Bank of the Ozarks qui devrait probablement faire bouger le marché, mais aussi Intel et JP Morgan, les choses sérieuses commencent.
Autrement les futures sont en hausse de 0.2%, mais vu ce qui s’est passé, on ne va pas se laisser avoir deux fois de suite. L’Euro/$ est à 1.0888, le Yen vaut 117.50, le Bitcoin est à 431$ et le rendement du 10 ans US est de 2.07%.
Pour le franc suisse, demain il y aura une veillée funèbre en mémoire du taux plancher, mais en attendant l’Euro/Suisse se traite à 1.0958 et peut-être que pour fêter le premier anniversaire des méthodes de cowboy de la BNS on va revoir les 1.10. Pendant ce temps, le $/Suisse vaut 1.0066.
Voilà, c’est tout pour ce matin. Et c’est déjà pas mal. Je vous souhaite une excellente journée, à la place du Nespresso, je vous suggère de tester le café Ethical Coffee pour changer, les capsules son biodégradables et le café est meilleur. Bon d’accord, ce n’est pas Clooney qui fait la pub, mais en même temps, c’est pas lui qui vous sert le café non plus.
Pour le reste, on se retrouve demain. Par contre si on perd encore 3%, je reste au lit et je ne me lèverais plus que quand ça rebondira. Si l’on en croit Edwards, je vais avoir le temps de me reposer !!!
Excellente journée et à demain !
Thomas Veillet
Investir.ch
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Winston Churchill
Serge Poznanski
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