mardi 29 septembre 2015

Vue Macro : la fin des Eldorados ?

* Chute des marchés brésiliens : le retour du scénario positif du S1 2014 est peu probable
* Sous-performance des marchés espagnoles : attention aux élections catalanes ce dimanche
* La fin du bipartisme va affaiblir davantage la capacité de réformes en Espagne

L’incertitude macroéconomique reste élevée. Cette semaine, l’attention des investisseurs s’est portée sur l’Amérique Latine et le Brésil en particulier. Bien que je sois plus confient sur les perspectives de croissance de l’Asie émergente à court terme, il y a peu de chance que le Brésil se redresse rapidement. Nous avions eu une vue tactique positive sur les marchés brésiliens au S1 2014, vue qui a très bien marché après le stress émergent causé par Bernanke en 2013. Mais en 2014, l’excédent budgétaire primaire était confortable et les élections portaient les espoirs de changements politiques. Malheureusement, aujourd’hui il n’y a plus de levier budgétaire et la crédibilité du gouvernement actuel est extrêmement faible. Les effets de contagion doivent être pris en compte car beaucoup de pays d’Amérique Latine souffre également d’une dépendance excessive aux matières premières, d’un manque de diversification de leur modèle économique, d’énormes inégalités et d’une corruption répandue. Ainsi, une période durable d’ajustements douloureux est face aux pays d’Amérique Latine.

En plus de l’incertitude macro, la confiance des investisseurs a été ébranlée par le scandale VW. Il n’y a pas de doute qu’en trichant, la réputation allemande a été touchée. Des investisseurs nous demandaient cette semaine si nous vivions un nouvel « Enron ». Je ne suis pas un expert automobile, mais lors d’un meeting avec Emmanuel Macron cette semaine, les politiques européens n’ont aucun intérêt à sacrifier un secteur qui représente une part non négligeable de l’emploi en Europe.

L’Espagne est en particulier un gros exportateur d’automobiles. Les marchés espagnols ont été les pires marchés de la Zone euro depuis un mois. Selon nous, cette sous-performance est justifiée d’un point de vue macroéconomique. En effet, le consensus a été extrêmement positif envers l’Espagne depuis longtemps mais il y a un manque de réformes depuis un an et l’incertitude politique en Catalogne et pour le pays avec la fin probable du bipartisme jette une ombre sur les perspectives à moyen terme de l’Espagne.

Vendredi dernier, j’étais d’ailleurs en Espagne pour rencontrer des hommes politiques du PP, du PSOE et de Podemos. En ce qui concerne les élections catalanes de ce dimanche, les partis en faveur de l’indépendance veulent transformer le scrutin en un referendum pour l’indépendance. Ils pourraient gagner les élections bien qu’aucun sondage n’a jamais donné plus de 50 % des intentions de votes à une coalition inhabituelle entre un parti d’extrême gauche et de droite. Dans ce cas, autant le status quo que l’indépendance semblent irréalistes. Selon les leaders du PSOE, une solution alternative pourrait être une réforme constitutionnelle où les spécificités des régions et en particulier celles de la Catalogne pourraient être mieux reconnues.

En ce qui concerne les élections générales à la fin de l’année, le scénario le plus probable est un gouvernement minoritaire socialiste soutenu par Podemos ou une coalition PSOE/Podemos. Un gouvernement minoritaire socialiste est déjà le cas dans plusieurs régions où Podemos soutient le PSOE sans prendre place dans les gouvernements locaux. Dans ce cas, il y a des sujets sur lesquels les deux partis devraient s’entendre : le combat contre la pauvreté, l’investissement dans l’éducation, l’amélioration du système de santé, la réforme de l’impôt sur les sociétés et le problème de la corruption. Le PSOE rejette en revanche l’idée d’une grande coalition avec le PP à ce stage. La dernière alternative pourrait être une coalition PP-Ciudadanos.

Quel que soit le résultat des élections générales, je pense que la fin du bipartisme en Espagne est un facteur de faiblesse politique. Il sera plus difficile de mettre en place des réformes et la trajectoire officielle de réduction des déficits publics qui apparaît déjà complètement irréaliste pour 2015 sera très difficile à tenir pour les prochaines années. Ainsi, l’incertitude politique en Espagne pourrait ne pas se conclure avec le résultat des élections catalanes ou générales cette année. Il se pourrait que ce ne soit que le début.

Bonne semaine
Pierre-Olivier Beffy
Chef Économiste Exane-BNP Paribas

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